Les Rois Nus, selon Günther Anders

Les Rois Nus, selon Günther Anders

La Thèse selon laquelle notre dépendance envers les « amis familiers » et le « monde familier » [la radio, la télévision, les « médias », Ndlr] nous aliène à nous-même est peut-être devenue problématique. Non parce qu’elle irait trop loin, mais parce qu’elle n’ose pas aller assez loin. Car supposer que nous, hommes d’aujourd’hui [1956 Ndlr], exclusivement nourris de succédanés, de stéréotypes et de fantômes, nous serions encore des « moi » ayant un « soi », et que ce serait ce régime alimentaire [la radio, la télévision, les « médias », Ndlr] qui nous empêcherait d’être « nous-mêmes », ce serait faire preuve d’un optimisme qui n’est peut-être plus de mise. L’époque où l’on pouvait être victime de l’ « aliénation », où celle-ci était un processus qui était effectivement à l’oeuvre, n’est-elle pas déjà derrière nous – du moins dans certains pays ? N’avons-nous pas déjà atteint un état où nous ne sommes plus du tout « nous-mêmes », mais seulement des êtres quotidiennement gavés d’ersatz ? Peut-on dépouiller celui qui est déjà dépouillé ? Peut-on dénuder celui qui est déjà nu ? Peut-on encore aliéner l’homme de masse à lui-même ? L’aliénation est-elle encore un processus ou n’est-elle déjà plus qu’un fait accompli ?

Günther Anders, « L’obsolescence de l’homme » (1956)
(trad. Christophe David, Ed. de l’Encyclopédie des Nuisances)

Le gars écrit ça en 1956 ! Moi j’abandonne. Je ne me bats plus. On est vraiment trop dans la merde.

Allez voir autour de chez vous, allez voir la nature brute, allez voir les paysages, les falaises, la mer, le défilé de Pierre-Lys, les gorges de l’Aveyron, les calanches de Piana, les monts du Cézalier, le lac d’Oo et le sommet du mont Valier…

Allez voir les chats, les chiens, les tortues, les baleines, les lions, les buffles, les tigres… Demandez-leur leur opinion.

On ne peut l’enlever à personne. Même le dernier des miséreux dans la plus terrible des favelas peut se lever et se tenir face au Soleil et sentir que le présent lui appartient tout autant qu’à n’importe lequel des plus puissants du monde. Contre cela ils ne peuvent rien, même s’ils essaient de toutes leurs forces.

Un jour ils arrêteront de détruire le monde.

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